Le prince et le paysan
(Auteur inconnu)
Il était une fois, dit un conte, un prince qui fuyait, pourchassé par des révolutionnaires décidés à le tuer et à lui prendre son trône. Terrifié, le prince entra dans la chaumière d'un paysan pour y chercher refuge.
Sans deviner à qui il avait affaire, le paysan lui conseilla de se dissimuler sous son lit. A peine le prince venait-il de s'y cacher que ses poursuivants enfonçaient la porte et se mettaient à fouiller tous les recoins de la chaumière.
Quand ils en arrivèrent au lit, ils se mirent à le larder de coups de couteau plutôt que de le déplacer, car il était fort lourd. Et puis, n'ayant rien trouvé, ils s'en furent.
Le prince, livide mais bien vivant, sortit de sa cachette dès qu'il eut entendu ses poursuivants s'éloigner. Se tournant vers le paysan, il lui dit alors : «Brave homme, sache que tu viens de sauver la vie de ton prince. Pour te récompenser, je te promets de t'accorder trois faveurs. Que désires-tu ?»
Le paysan, homme simple, réfléchit un instant et dit :
«Ma chaumière est en bien mauvais état et je n'ai jamais assez d'argent pour la faire réparer. Pourriez- vous le faire faire ?»
«Insensé ! s'écria le prince, je mets mes richesses à tes pieds et tu ne songes qu'à ta masure! Mais soit! Quel est ton deuxième souhait ?»
«Eh bien, Sire, mon voisin vend les mêmes marchandises que moi au marché ; ne serait-il pas possible de lui trouver un autre emplacement, afin que lui et moi ne nous fassions plus concurrence ?»
«Idiot ! s'écria le prince. Bien entendu, je ferai ce que tu demandes mais quelle folie de te contenter de peccadilles quand tu sais que tu peux tout obtenir ! Fais bien attention de ne pas me mettre en colère en formulant ton dernier souhait.»
Incapable de contenir plus longtemps sa curiosité, le paysan dit alors: «Sire, j'aimerais savoir ce que vous avez ressenti pendant que vos ennemis transperçaient le lit avec leurs couteaux.»
Le prince, furieux, s'écria : «Comment oses-tu demander à ton prince de décrire ses émotions ? Tu seras décapité demain matin pour te guérir de ton impudence !»
Le prince fit alors venir ses gardes qui escortèrent le pauvre homme jusqu'à la prison.
Toute la nuit, le paysan se lamenta sur sa folie et trembla à l'idée de ce qui l'attendait.
Au lever du soleil, ses geôliers vinrent le chercher pour le conduire dans une cour où l'attendait le bourreau revêtu de sa cagoule noire.
Le paysan terrifié dut s'agenouiller devant le billot et entendit un soldat compter «Un... Deux... », mais avant qu'il ait pu dire «Trois», un cavalier fit irruption dans la cour en criant : «Arrêtez ! Par ordre du prince !»
A ces mots, le bourreau releva sa hache dont le tranchant était déjà posé sur la nuque du paysan. Tout tremblant, celui-ci se releva et regarda le soldat qui venait de lui sauver la vie.
«Son Altesse te pardonne et m'a ordonné de te remettre ce billet», dit le soldat.
A travers des larmes de joie et de soulagement, le paysan lut ces quelques mots :
«Ton dernier souhait était de savoir ce que j'avais éprouvé pendant que mes ennemis me cherchaient sous le lit. Ton désir est exaucé puisque maintenant, tu le sais !»
Inscrivez-vous au blog
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 2 autres membres